14.09.2011
Passer en classe de développement:
un frein à l’apprentissage
L’intégration scolaire des enfants présentant des difficultés d’apprentissage améliore-t-elle leur future situation professionnelle et sociale? Les résultats d’une étude du Fonds national – portant uniquement sur les cantons germanophone – dirigée par le Dr Urs Haeberlin, professeur émérite et ancien directeur de l’Institut de pédagogie curative de l’Université de Fribourg, donne des réponses sans équivoque à cette question.
La question de la scolarisation des enfants montrant des difficultés scolaires en classes de développement ou en classes régulières fait débat dans de nombreux cantons. Aujourd’hui, la surreprésentation d’enfants de familles socialement défavorisées – en particulier ceux issus de la migration – dans ce type de classes, replace la question au centre de l’actualité. En outre, les critères d’admission en classe développement sont loin d’être clairs et divergent fortement selon les régions.
Une étude financée par le Fonds national suisse clarifie les effets à long terme de la séparation en classes de développement et de l’intégration en classes régulières. Concernant les conclusions de politique éducative, il faut relever que l’étude ne prend pas en compte les enfants présentant des retards mentaux scolarisés dans des écoles spécialisées en pédagogie curative.
Diplômés de classes de développement pénalisés à leur entrée dans le monde professionnel
Les jeunes adultes qui sont passés par les classes de développement n’ont généralement accès qu’à des métiers avec un très bas niveau d’exigence ou restent très souvent sans travail. Les perspectives professionnelles sont clairement meilleures pour un jeune adulte présentant les mêmes faiblesses scolaires, mais n’ayant pas fréquenté de classe de développement. Même trois ans après la fin de leur scolarité, environ un quart des anciens élèves de classes de développement n’ont trouvé aucun débouché professionnel, alors que, pour ceux issus de classes normales, ce risque est quatre fois moins élevé. Ils ont même certaines chances d’accéder à une formation dans un secteur moyen ou élevé. Ce n’est que rarement le cas pour un ancien élève de classe de développement. Durant leur passage à la formation professionnelle, ils abandonnent souvent à plusieurs reprises leurs tentatives d’entrée dans le monde du travail.
L’étude montre également que l’estime de soi des jeunes issus de classes de développement est plus bas que celui d’élèves de classes régulières ayant des faiblesses comparables. Ils disposent de réseaux sociaux remarquablement plus restreints que les jeunes de classes régulières. Ceci indique une insertion sociale plutôt moyenne.
Implications positives des expériences d’intégration en milieu scolaire
Les résultats prouvent également qu’une bonne intégration durant la scolarité est rentable à plus d’un titre au début de l’âge adulte. L’expérience de l’intégration scolaire encourage les attitudes favorables à l’égard des étrangers. A contrario, chez les jeunes adultes qui n’ont pas vécu d’expériences positives d’intégration durant leur scolarité, il faut plutôt compter avec des attitudes hostiles aux étrangers. Cette étude relève des rapports significatifs entre politique éducative et politique sociale: celui qui développe plus de contact avec des élèves étrangers durant sa scolarité, a aussi plus de contacts et des attitudes plus positives vis à vis des étrangers à l’âge adulte. C’est particulièrement prégnant au niveau des amitiés : les jeunes suisses qui ont déjà des amis étrangers durant leur scolarité, ont aussi plus souvent, une fois adulte, des personnes de confiance de nationalité étrangère dans leur entourage proche. Des contacts positifs avec des enfants d’une autre origine peuvent donc manifestement se poursuivre à travers toute la scolarité jusqu’à l’âge adulte.
Les résultats du projet Fonds national n° 116037 sont présentés dans un livre qui vient de paraître : Michael Eckhart, Urs Haeberlin, Caroline Sahli Lozano, Philippe Blanc: Langzeitwirkungen der schulischen Integration. Eine empirische Studie zur Bedeutung von Integrationserfahrungen in der Schulzeit für die soziale und berufliche Situation im jungen Erwachsenenalter. Haupt Verlag Bern 2011 (ISBN 978-3-258-07704-8).
Contacts:
Prof. Urs Haeberlin, Institut de pédagogie curative, tél. prof. 026 300 77 04, tél. privé 026 481 40 62, urs.haeberlin@unifr.ch
Dr Michael Eckhart, Institut für Heilpädagogik der Pädagogische Hochschule Bern, tél. prof. 031 309 26 36, tél. privé 031 351 17 59, michael.eckhart@phbern.ch
Lic.phil. Caroline Sahli, Institut für Heilpädagogik der Pädagogische Hochschule Bern, tél. prof. 031 309 26 34, tél. privé 031 372 68 93, caroline.sahli@phbern.ch