Le profit et la durabilité sont comme l’eau et le feu, a priori plutôt difficile à marier. Pourtant, depuis plus de vingt ans, la Fondation Ethos milite en faveur d’une forme d’investissement qui préserve les générations futures. Non sans connaître un certain succès. Avant sa conférence de vendredi, le fondateur d’Ethos, Dominique Biedermann, a accordé une interview exclusive à Alma&Georges.
La fondation Ethos existe depuis plus de 20 ans. Quelles sont les réalisations, en matière d’investissements responsables, dont vous êtes le plus fier?
Nous avons réussi à convaincre plus de 200 caisses de pension suisses non seulement de sélectionner les titres avec des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance, mais également d’exercer systématiquement les droits de vote d’actionnaires et d’engager le dialogue avec le management des sociétés. Parallèlement, nous sommes dorénavant reconnus par la grande majorité des sociétés cotées comme un actionnaire et un partenaire de dialogue loyal à long terme.
Quel message souhaitez-vous délivrer à des jeunes, votre public du 22 septembre, qui jouent à fructifier leur portefeuille?
Evaluer une société implique non seulement une analyse financière classique, mais également une analyse très pointue des risques et de la stratégie en matière environnementale, sociale et de gouvernance.
Vous avez créé un indice tenant compte des critères de bonne gouvernance. Quelles informations avez-vous à votre disposition pour affirmer qu’une entreprise est socialement et environnementalement responsable?
Nous analysons l’ensemble des informations publiées par les sociétés sur leur gouvernance, ainsi que sur leur stratégie et leurs réalisations dans les domaines environnementaux et sociaux. Nous avons également accès à plusieurs bases de données de consultants, de même qu’à des informations spécifiques provenant de différentes ONG. Finalement, en tant qu’actionnaire, nous avons aussi beaucoup de contacts directs avec les instances dirigeantes des sociétés concernées.
Comment procédez-vous dans le cas des multinationales actives dans de très nombreux pays et dans des secteurs économiques très variés? Est-il véritablement possible de mesurer l’impact de leurs activités? Est-il possible de fournir de la «transparence» aux investisseurs?
Les entreprises publient de plus en plus d’informations sur l’impact de leurs activités sur l’ensemble de leur chaîne de création de valeur, aussi bien en termes environnementaux que sociaux. Lorsque les données sont lacunaires, nous faisons partie des actionnaires qui font pression pour que les sociétés améliorent leur transparence. Dans ce cadre, nous essayons d’agir de manière groupée avec d’autres actionnaires suisses et étrangers.
L’argent de notre deuxième pilier est-il bien investi ou doit-on craindre qu’il finance également des entreprises ne respectant ni les droits de l’homme ni l’environnement?
Il subsiste malheureusement de nombreuses institutions de prévoyance qui n’appliquent pas encore de critères de gestion extra financiers. C’est regrettable et je conseille vivement aux assurés de demander à la direction de leur fonds de pension si de tels critères entrent dans le processus d‘investissement et, si ce n’est pas le cas, pour quelles raisons.
Peut-on être un «bon investisseur», c’est-à-dire faire de bonnes affaires, en misant sur des entreprises s’embarrassant de considérations éthiques?
Bien sûr! Cela est possible sur un horizon d’investissement à long terme. En fin de compte, une entreprise avec des collaborateurs motivés, des clients satisfaits, des fournisseurs fidèles et des actionnaires loyaux aura une meilleure performance et présentera moins de risque à long terme. C’est ce que nous observons chez Ethos.
Quel est le prochain «combat» que vous avez en ligne de mire?
La lutte contre le changement climatique reste l’une de nos préoccupations principales en tant qu’investisseur orienté sur la durée. Dans ce but, nous sommes en dialogue avec les sociétés pour qu’elles définissent et adoptent des programmes ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre. De notre côté, nous publions depuis cette année systématiquement l’intensité carbone de nos portefeuilles de titres. Nous sommes très attentifs à ce que la sélection des titres permette d’avoir une intensité inférieure à celle du marché. C’est notre contribution dans la lutte contre le réchauffement du climat.
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- Conférence de Dominique Biedermann, le vendredi 22.09.2017, 16h30 – 18h00, Site PER 21 / Salle C230
Contact: jonas.renggli@unifr.ch - Site de la BSU
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