18.03.2014

Grandir mieux – l’urbanisme en tant que processus


Qui définit le paysage urbain et comment créer de la qualité? Une étude de l'Unité de géographie de l’Université de Fribourg examine les processus urbanistiques et montre comment les spécialistes de la branche et les architectes peuvent participer plus efficacement au développement des agglomérations.


(Image: Thinkstock)

Accusé d’être anonyme et sans concept clair, le nouveau paysage urbain des communes péri- et suburbaines génère un fort sentiment de malaise auprès des urbanistes et des architectes, qui n’y voient qu’une suite de zones aléatoires, sans harmonie interne, façonnées plus par le hasard que sur la base d’un plan concret. Plus encore: toute urbanité en serait totalement absente. L’étude Prozess Städtebau, qui vient de paraître, dénonce le fait que de telles assertions n’améliorent pas vraiment la situation.

Ruptures urbaines


Le groupe de recherche, dirigé par le Professeur Joris Van Wezemael de l’Unité de géographie de l’Université de Fribourg, ne considère pas uniquement l’urbanisme comme un résultat esthétique, mais comme une pratique. Il s’interroge donc sur la façon dont le paysage urbain est défini. Pour matérialiser cette réflexion, les chercheurs se réfèrent à des villes actuellement en construction, ou plus précisément à des communes soumises à de gros changements démographiques: Visp, par exemple, qui avec la NLFA (Nouvelle Ligne Ferroviaire à travers les Alpes) est tout à coup devenu un point névralgique du réseau routier et ne se situe plus qu’à un jet de pierre de Berne pour les pendulaires; Wetzikon et Uster qui, grâce au S-Bahn, appartiennent désormais au centre métropolitain de Zurich et qui connaissent donc une forte immigration; ou encore St. Margrethen qui, après le déclin économique d’un important commerce de transformation du bois, a dû chercher une autre affectation pour ce terrain industriel en friche.

L’étude qualifie ces changements, déterminés par l’extérieur, de «Ruptures urbaines»; elle s’interroge sur les structures, les dynamiques et les modes de commande, à la base des nouveaux aménagements du territoire urbanisé. Quels acteurs, urbanistes et architectes mis à part, ont pris part à ce processus? De quelle manière la question de l’urbanisme a-t-elle été traitée? Quelles réinterprétations, transformations et extensions les paysages et plans urbains ont-ils traversées? Comment ont-ils été renforcés ou atténués, dissimulés, détournés et même parfois abandonnés?

Espace fragmenté


Le Professeur Van Wezemael arrive à la conclusion suivante: «Le paysage urbain est une représentation des activités passées et actuelles des communes étudiées. Il est donc un miroir de la société». Ces espaces ont ceci en commun que – indépendamment du processus qu’ils traversent – ils sont agencés dans différentes zones urbaines fermées sur elles-mêmes et donc, par la force des choses, fragmentées. «Ce phénomène peut être considéré comme une qualité urbaine pure et dure», constate Joris Van Wezemael, «nous le rencontrons également dans les centres-villes qui se sont agrandis au cours du temps.» L’étude montre aussi que ces aires ont été conçues de différentes manières. Plus les autorités politiques sont fortes, plus elles peuvent exercer l’influence de leurs instances techniques, plus l’aménagement du territoire est urbanisé. Là où leur pouvoir fait défaut, il est plus aléatoire, avec pour résultat un paysage urbain composé d’une suite de bâtiments hétérogènes.

«Sprawl better» – s’agrandir mieux et plus joliment, conclut Joris Van Wezemael en invitant d’abord les urbanistes et les architectes à accepter ces nouveaux paysages urbanisés tels qu’ils sont. «C’est uniquement quand nous prendrons au sérieux le paysage urbain et les forces qui l’influencent depuis sa création que nous pourrons intervenir de manière constructive et les améliorer.»

Participation plus forte


L’étude recommande une participation plus forte des acteurs. «La population devrait pouvoir prendre part aux projets urbanistiques», défend Joris Van Wezemael. A cette fin, il prône une simplification de la communication. En lieu et place du jargon professionnel, les nouvelles identités urbaines devraient être travaillées sur la base d’images et d’histoires faciles à comprendre. Le Professeur conseille aussi d’exploiter au mieux les processus politiques à tous les échelons, du plan directeur jusqu’au plan d’affectation en passant par les plans détaillés. Pour finir, l’étude plaide également en faveur d’une information et d’un échange entre les communes et les régions concernant leurs instruments politiques et leurs combinaisons.

L'EPF de Zurich (Département d'architecture) et l'Université de Zurich (Institut des sciences politiques) ont participé à l'étude en tant que partenaires de projet. En vue des tâches à venir, l’étude, qui fait partie du programme national de recherche PNR 65 Nouvelle qualité urbaine, fournit des indications précieuses, concernant la mise en œuvre de la nouvelle loi sur l’aménagement du territoire et, plus particulièrement, en ce qui concerne le respect du sol.

Liens vers l'étude
http://issuu.com/processurbandesign/docs/schlussbericht_example_digit
http://vanwezemael.wordpress.com/

PNR 65
Le Programme national de recherche «Nouvelle qualité urbaine» (PNR 65) vise à développer et à affiner des concepts et des stratégies pour une nouvelle qualité urbaine et à examiner l’applicabilité des résultats de recherche. Les résultats doivent mettre en évidence des méthodes innovantes et réalisables à moyen et long terme de développement urbain, de rénovation urbaine et d'urbanisme en Suisse.


Contact
Prof. tit. Joris Ernest Van Wezemael, Unité de géographie, 078 764 39 81, joris.vanwezemael@unifr.ch