14.11.2012
Faible efficacité des impôts environnementaux
Sandra Daguet est la lauréate, cette année, du Prix de la recherche sur l’environnement, décerné tous les deux ans par l’Université de Fribourg. Dans sa thèse de doctorat en sciences économiques et sociales, elle a démontré la faible efficacité des impôts environnementaux en Suisse et en Europe.
(Photo: Thinkstock)
L’impôt environnemental est un des outils économiques mis en place dans le but de diminuer une pollution. Il a pour caractéristique principale d’être incitatif, donc payé sans contrepartie à l’Etat (de même que la TVA ou l’impôt sur le revenu) comme par exemple la taxe sur le CO2. La thèse intitulée Environmental Taxes: Institutions, Implementation and the Use of Revenues analyse la mise en œuvre d’une dizaine d’impôts environnementaux et leur efficacité sur le continent européen. La conclusion est sans appel: seul un impôt environnemental est considéré comme efficace, celui qui taxe les sacs en plastique en Irlande ! Il semble bien accepté par la population, car on lui laisse le choix entre payer très cher un sac en plastique ou lui substituer le sac en papier ou en tissu. D’après la chercheuse, cela ne remet pas forcément en cause l’outil sur le plan théorique. «Le problème est la difficulté de mettre en œuvre un instrument économique théoriquement prometteur dans un système politique complexe.»
Un thème actuel
Les écarts découverts entre la théorie et la pratique ont conduit Sandra Daguet à en chercher les raisons, sans se contenter d’analyser des modèles théoriques. Sa thèse interdisciplinaire rassemble des éléments d’économie, de droit et de sciences politiques, et elle se base sur des analyses de cas concrets. Elle a pu ainsi démontrer que les écarts entre la théorie et la pratique sont causés principalement, en Suisse comme en Europe, par de fortes contraintes institutionnelles: le système politique en vigueur, l’activisme des groupes de pression, le fédéralisme, la forte résistance de la population et des entreprises concernées à l’introduction d’un nouvel impôt, peuvent expliquer l’échec de la mise en œuvre de l’impôt environnemental. En pratique, l’impôt environnemental est rendu inefficace à cause d’un grand nombre d’exonérations et des taux d’impôts trop bas.
La thèse de Sandra Daguet couvre un thème d’actualité, à la suite du protocole de Kyoto, et elle apporte des pistes de réflexion pour les politiques environnementales. Selon l’économiste: «Soit il faut avoir le courage politique d’introduire un impôt environnemental avec un taux suffisamment élevé, et sur une base assez large, pour qu’il produise un réel effet, soit il faudra se tourner vers d’autres instruments».
Reconnaissance de l’économie environnementale
C’est la première fois que ce prix est remis à une économiste. Pour Sandra Daguet, «il constitue une reconnaissance de la branche de l’économie environnementale, qui prend de plus en plus d’importance depuis sa naissance dans les années septante».
Le Prix de la recherche sur l’environnement, d’une valeur de 10 000 francs, est décerné tous les deux ans. Il est financé par la Société anonyme pour l’incinération des déchets du Canton de Fribourg et de la Broye vaudoise (SAIDEF). Il vise la promotion de la recherche disciplinaire et interdisciplinaire dans le domaine des sciences de l’environnement; il récompense les travaux scientifiques d’excellence et en particulier ceux qui vont au-delà de la connaissance scientifique et qui proposent des solutions pratiques.
Contact:
Sandra Daguet, sandra.daguet@unifr.ch, 078 642 69 33
André Strasser, président de la commission du Prix de la recherche sur l’environnement et Prof. associé au departement de géosciences de l’Université de Fribourg, andreas.strasser@unifr.ch, 026 300 89 78
Plus d'infos sur le Prix de la recherche sur l'environnement: http://www.unifr.ch/environment/fr/umweltpreis