Les voyages les plus enrichissants sont ceux qui nous font prendre conscience du sens de la vie. Mais il y a aussi ceux qui nous font perdre pied et nous donnent le sentiment d’un manque inquiétant de repères. « Tous les chemins mènent à Rome » dit un proverbe latin, mais beaucoup se sont égarés au cours de leur vie. Que se passe-t-il quand on quitte la grande route et on se retrouve au milieu d’ « une forêt obscure » ? Comment trouve-t-on son chemin ? Dans un de ses livres d’aphorismes, Léon Chestov prend comme devise l’annonce qu’il rencontra lors de ses promenades sur les sentiers escarpés dans les montagnes suisses : « Nur für Schwindelfreie ! » L’expérience des abîmes comme l’errance en dehors des routes balisées ne sont destinées qu’à ceux qui ne connaissent pas le vertige. Mais pour vaincre la peur de l’inconnu, il suffit d’accepter de se perdre. C’est ce que nous apprend l’un des derniers récits de Tolstoï : Maître et serviteur.