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Comment les avions volent-ils? Valentine, 7 ans

C’est grâce à l’effet de l’air sur les ailes. Fait étrange, deux principes physiques expliquent ce phénomène, selon qu’on s’intéresse aux travaux d’Isaac Newton ou du Suisse Daniel Bernoulli.

Voler comme un oiseau. Ce vieux rêve humain, on en trouve déjà la trace dans le mythe grec d’Icare, qui raconte comment le fils de l’architecte Dédale a vu fondre ses ailes de cire et de plumes en s’approchant trop près du soleil. Au-delà de la légende, et de manière plus pragmatique, l’homme a conquis le ciel en observant la nature et en expérimentant. Certains ont même payé de leur vie ces découvertes, comme le pionnier allemand Otto Lilienthal (1848–1896), décédé accidentellement près de Berlin lors d’un vol plané à une quinzaine de mètres du sol. Aile fixe, turboréacteur, fuselage en aluminium, plus d’un siècle d’avancées technologiques plus tard, on considère les avions comme le moyen de transport le plus sûr du monde. Et des appareils lourds de plusieurs centaines de tonnes déplacent quotidiennement marchandises et passagers autour du globe.

 

Action – réaction

Comment de tels paquebots aériens peuvent-ils s’arracher du sol et se maintenir en l’air sur des centaines de kilomètres? Par une force que les physiciens appellent la portance, qui agit sur les ailes de l’avion. Avec la traction, soit la force qui pousse l’aéronef en avant (par exemple avec un réacteur), la portance permet de vaincre d’autres forces, comme le poids de l’engin qui le pousse vers le bas et la traînée, c’est-à-dire le frottement de l’air qui le freine. Plusieurs principes permettent la portance. On doit l’un d’eux au savant britannique Isaac Newton (1643–1727), et notamment à sa troisième loi du mouvement qui veut que, pour chaque action, il existe une réaction de sens opposé et de force égale.

 

Ainsi, dans le cas d’un avion, le flux d’air, dévié par l’aile vers le bas, exerce une poussée de sens contraire (donc vers le haut), ce qui permet notamment à l’appareil de décoller à basse vitesse, explique Véronique Trappe, maîtresse d’enseignement et de recherche au Département de physique de l’Université de Fribourg. C’est ce principe physique que l’on expérimente, par exemple, simplement en étendant une main par la fenêtre d’une voiture roulant à une certaine vitesse. Suivant l’orientation de la paume de notre main, le vent exerce une force poussant notre bras vers le haut ou vers le bas.

 

© Jan von Holleben

L’autre principe permettant d’assurer la portance d’un aéronef a été théorisé par le physicien, mathématicien et médecin suisse Daniel Bernoulli (1700–1782). Pour comprendre l’importance de l’effet Bernoulli sur la portance, il faut considérer que l’air est un fluide. «Si l’on considère un avion en vol, on peut dire que l’aile coupe en deux le vent que l’appareil crée par son propre mouvement. On a donc l’air qui passe par-dessus l’aile et celui qui passe par-dessous», précise Véronique Trappe. La forme de l’aile étant bombée sur le dessus, l’air doit parcourir un plus grand chemin pour la contourner. Cette différence de vitesse entre le dessous et le dessus génère une différence de pression qui pousse l’aile vers le haut. «Plus l’appareil va vite et plus la différence de pression augmente», détaille la physicienne. On peut voir ce principe à l’œuvre dans le dispositif du physicien italien Giovanni Battista Venturi. En mesurant la vitesse d’un fluide, par exemple de l’eau, passant dans un tube dont le diamètre évolue, on remarque que la pression augmente lorsqu’il est plus large, car la vitesse de l’eau diminue. A l’inverse, la vitesse du fluide augmente lorsque le tube se rétrécit, faisant ainsi diminuer sa pression.

 

Questions ouvertes

Aujourd’hui, alors que les ingénieurs en aéronautique conçoivent des appareils de plus en plus sophistiqués, certaines questions restent pourtant ouvertes. Notamment celle de savoir à quel moment et dans quelle proportion les deux principes, Bernoulli et Newton, agissent sur la portance de l’avion. «Les effets doivent être maximisés au sol pour le décollage. Un maximum d’air doit alors être dévié vers le bas par les ailes pour permettre à l’avion de s’élever dans les airs. Quant à l’atterrissage, il se fait surtout par une réduction de la vitesse de l’appareil, qui tombe alors sous l’effet de la pesanteur», explique Véronique Trappe.

 

Notre experte Véronique Trappe est maîtresse d’en­sei­gnement et de recherche à l’Institut de physique. Spécialiste des fluides, elle fait partie du groupe de recherche sur la matière molle et du National Centre of Competence in Research (NCCR) sur les matériaux bio-inspirés.

veronique.trappe@unifr.ch