Portrait

Sa vie au fil des ondes

Journaliste radio, chroniqueuse littéraire, productrice d’émissions consacrées à la sexualité et aux questions de genre, Christine Gonzalez multiplie les projets. Rencontre avec cette ancienne étudiante de l’Université de Fribourg qui mène sa vie passionnément.

Des parents professeurs, un grand-père maternel fondateur de la librairie Albert le Grand et des livres du sol au plafond. La littérature et l’édition gravées dans l’ADN de sa famille depuis plusieurs générations. «J’ai grandi à Villars-sur-Glâne et, d’aussi loin que je me souvienne, il y a toujours eu des livres à la maison. Très vite, ma mère m’a fait lire les ouvrages qu’elle proposait à ses élèves, plus âgé·e·s que moi. La littérature a toujours été une passion». Même si, enfant, Christine Gonzalez se rêvait chanteuse ou vétérinaire, sa maturité économique en poche, elle rejoint «naturellement» la Faculté des lettres et des sciences humaines de l’Université de Fribourg. Elle décide d’y étudier la littérature française, la linguistique et les sciences des religions. «J’ai tout de suite senti que c’était fait pour moi. J’ai choisi Fribourg, car j’étais ancrée dans cette ville. Ma famille, mes ami·e·s, mon cercle social. Et puis, il y avait cet attachement à cette Université. Mes parents s’y sont rencontrés. Ils se sont mariés dans la chapelle de l’Université. Il y a toujours eu une mythologie familiale autour de l’Alma mater que je considérais comme un lieu quasi sacré. Il fallait absolument que j’y aille!»

L’énergie de l’Uni

De ses années universitaires, Christine tire un bilan contrasté. «J’ai vécu des moments d’angoisse en me demandant si j’allais réussir
mes études. En même temps, il y avait cette incroyable liberté. Je décidais ce que je voulais étudier et la manière de le faire. Quand la certitude s’est installée que j’étais capable de mener à bien mon cursus, j’ai savouré. Ces années d’université ont été des moments importants par les rencontres que j’ai pu y faire. C’était un lieu incroyable de brassage entre personnes issues d’horizons différents. Il y avait une très belle énergie.» Durant ses années d’études, une certitude l’accompagne. Christine ne vouera pas sa vie à l’enseignement. «Avec des parents profs, je savais à quoi m’attendre. Si tu n’as pas la vocation, c’est mort! Depuis longtemps, le journalisme m’intriguait. J’adorais lire La Liberté le matin au petit-déjeuner. Je m’imaginais être cette personne qui observe et qui raconte ces histoires. J’idéalisais beaucoup cette valeur fondamentale du journalisme qui consiste à recevoir et à transmettre. Avant la fin de mes études en 2005, je rêvais d’être engagée à La Liberté et, pour préparer l’entretien d’embauche, j’ai postulé à Radio Fribourg. Finalement, c’est là que j’ai été engagée sans avoir envoyé mon dossier au journal fribourgeois.»

La voie des ondes

A Radio Fribourg, Christine Gonzalez se fait rapidement un nom et une voix. Et depuis qu’elle a rejoint la RTS, sa vie oscille au fil des ondes et des propositions. Les siennes, le plus souvent. Journaliste littéraire sur Espace 2, puis chroniqueuse dans l’émission culturelle Vertigo sur La Première, elle anime aujourd’hui Question Q et Question Genre, des rendez-vous radio consacrés à la sexualité et aux questions de genre. Christine aime aussi imaginer de fausses Telenovelas satiriques sur France Inter. A chaque émission une teinte, un timbre et cette passion, toujours intacte. «Depuis toutes ces années, c’est toujours aussi intense. Ce métier m’apporte de plus en plus de sens. J’ai toujours aimé observer, recueillir, écouter, transmettre, parler au plus grand nombre. Le service public, c’est là où je me sens le plus en adéquation avec mes valeurs. Aujourd’hui, cela consiste à donner la parole sur les questions de minorités, de genre et de sexualité. Des thématiques qui doivent exister, mais auxquelles on ne laisse pas forcément de place. Et puis je m’amuse, ce qui est devenu une de mes exigences professionnelles.»

Du «Gouinistan» au «Vieillistan»

Retracer le parcours de Christine Gonzalez, c’est aussi parler de l’année 2008. «Je travaille à Radio Fribourg. J’ai une relation avec un homme depuis dix ans. Et là, je tombe follement amoureuse d’une femme. Il faut le vivre pour le dire. Un soir, à l’Ancienne Gare, auprès d’un inconnu qui deviendra mon meilleur ami, je fais mon coming out. A partir de là, tout a démarré.» Christine parle d’une reconnexion à celle qu’elle est vraiment. De la découverte d’un univers. «A Fribourg, la vie était différente à l’époque. A ma connaissance, il n’y avait pas d’association LGBTQIA+ à l’Université et, si elle existait, elle n’avait pas pignon sur rue. Nous n’avons jamais abordé ces thématiques en littérature. Il y avait une invisibilité totale de ces sujets-là. Aujourd’hui, les universités proposent des études sur le genre. Ces questions ont pris une place.» Une place que Christine a décidé d’offrir. En 2022, elle lance une série de podcasts avec sa compagne Aurélie Cuttat. Un projet intime, intelligent, dans lequel les deux journalistes parlent de leur couple et rencontrent des lesbiennes et des personnalités du milieu LGBTQIA+. Voyage au Gouinistan rencontre un vif succès, ce qui encourage les deux femmes à réitérer l’expérience cette année avec Destination Vieillistan. Dix épisodes qui traitent du vieillissement au sein de la population queer. Christine et Aurélie se sont mariées fin mai pour le mieux et le meilleur, comme les projets qui fourmillent déjà dans leurs têtes. Oreilles sensibles à vos écouteurs!  

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