Interview

Au-delà du bilinguisme

Depuis les années 1990, la stratégie de communication de l’Université de Fribourg est systématiquement axée sur le bilinguisme. Or, actuellement, aussi bien le nombre que le pourcentage d’étudiant·e·s germanophones de l’alma mater sont en baisse. Analyse avec la Rectrice de l’Unifr Katharina Fromm, le Doyen de la Faculté de droit Jacques Dubey et le Syndic de Fribourg Thierry Steiert.

Comment expliquer la baisse du pourcentage – et du nombre – d’étudiant·e·s germanophones à l’Unifr?

Katharina Fromm: Ich glaube, dass verschiedene Faktoren dazu beitragen, dass sich das Verhältnis Deutschsprachige zu Französischsprachigen verschoben hat. Zum einen gibt es in der deutschsprachigen Schweiz neue Universitäten, die gegründet wurden. Zum Beispiel bietet die Universität Luzern Studiengänge an, die unseren sehr ähnlich sind. Studierende aus der Innerschweiz gehen daher heute vielleicht eher nach Luzern. Auch aus dem Tessin – aus diesem Kanton kommen ja auch einige deutschsprachige Studierende – kam es durch die direkte Zuglinie nach Zürich ebenfalls zu einer gewissen Umlenkung von Studierenden. Und schliesslich ist der traditionell katholische Aspekt der Universität vielleicht auch nicht mehr so stark wie früher.
Thierry Steiert: Ein Problem, das man manchmal unterschätzt, ist, dass die Stadt Freiburg in der Deutschschweiz immer mehr als rein französischsprachig wahrgenommen wird. Viele Deutschschweizer_innen wissen gar nicht mehr, dass Freiburg an der Sprachgrenze liegt und dass die Stadt auch eine deutschsprachige Identität hat. Dies wird auch auf die Universität übertragen und manche Studierende denken, man könne hier nur auf Französisch studieren. Wenn in den deutschsprachigen Medien von Freiburg die Rede ist, wird oft der französische Namen erwähnt: «In Fribourg hat sich etwas ereignet…». In der kantonalen Verfassung steht aber klar: «La capitale du canton est Fribourg en français et Freiburg en allemand». Wir sind daran ein zweisprachiges Logo der Stadt zu entwickeln; bis heute ist das Logo ja «Ville de Fribourg». Wir haben auch zusammen mit der Universität Produkte entwickelt auf denen es beide Bezeichnungen gibt.
Jacques Dubey: A mon avis, cette évolution s’inscrit dans un phénomène global en Suisse de perte de l’appétence pour la langue partenaire. En l’occurrence, de perte d’intérêt du côté de la Suisse alémanique pour le français. Si on regarde quels cantons maintiennent le français comme première langue «étrangère», il n’y a sauf erreur plus que Berne, Soleure et Bâle. Tous les autres sont passés à l’anglais. Dans ces circonstances, c’est sûr que si l’Université de Fribourg se positionne comme une université bilingue, elle attire moins, car il y a moins d’intérêt à venir se confronter à la langue française. La perte du sentiment identitaire catholique joue aussi beaucoup. Les Alémaniques ne venaient pas forcément ici parce qu’on était bilingue, mais parce qu’on appartenait à une certaine tradition de pensée. Et l’école de pensée fribourgeoise – qui ne concernait d’ailleurs pas que la théologie mais aussi, par exemple, la linguistique française ou l’économie politique – est peut-être moins forte actuellement, en raison des modes de recrutement et de l’internationalisation de l’enseignement.

Au fond, que veut-on dire par université «bilingue»?

Jacques Dubey: A la Faculté de droit, le bilinguisme est compris ainsi: on peut faire un cursus exclusivement en français, exclusivement en allemand ou panacher. Tous les cours obligatoires et pratiquement tous les cours à option sont proposés en deux modes et ont lieu en même temps. Or, cette possibilité d’opter pour un cursus complètement germanophone n’est probablement pas assez connue. En se vendant uniquement comme une université bilingue, on donne à penser que les étudiant·e·s sont obligé·e·s de se confronter à la langue partenaire en venant à Fribourg, ce qui n’est pas du tout le cas. Pour rebondir sur la question du logo évoquée par Thierry Steiert: la charte visuelle de l’Université oblige à utiliser un logo bilingue. Mais je pense que c’est déjà trop! On devrait être autorisé à utiliser un logo exclusivement en allemand lorsqu’on fait une campagne en allemand et exclusivement en français lorsqu’on s’adresse à des francophones.

Est-ce que cette possibilité d’étudier à l’Unifr sans parler un mot de la langue partenaire concerne aussi les autres facultés?

Katharina Fromm: Das ist in den Fächern sicherlich richtig, in welchen die Sprache besonders wichtig ist. In den Naturwissenschaften haben wir nicht das Personal, um das ganze Studium parallel auf Deutsch oder auf Französisch anzubieten. Entsprechend gibt es in den Naturwissenschaften sogar ein dreisprachiges Studium mit Kursen, die gemischt auf Deutsch, Französisch und Englisch angeboten werden. Aber es gibt durchaus viele Studienrichtungen, in denen man nur auf Deutsch, nur auf Französisch oder mit einer «mention bilingue» studieren kann.

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Katharina Fromm est rectrice de l'Université de Fribourg. Elle est également professeure de chimie. 
katharina.fromm@unifr.ch

D’après vous, Jacques Dubey, l’Université devrait-elle carrément renoncer à se positionner comme bilingue?

Jacques Dubey: Attention, nous tenons beaucoup aux cursus bilingues. Comme vient de le dire Katharina Fromm, ils sont valorisés par le biais de mentions, notamment «bilingue» et «bilingue plus». Nous sommes aussi en train d’introduire une mention «prestations en anglais». Nous favorisons donc autant que possible la confrontation à l’autre langue nationale et à l’anglais. L’attractivité de la Faculté de droit en Suisse romande tient beaucoup à l’existence de sa section alémanique. Les Romand·e·s sont très intéressé·e·s à venir faire du droit en allemand, car dans notre pays le 80% de la doctrine et de la jurisprudence est produit dans cette langue. Mais du point de vue du message vers la Suisse alémanique, je pense que nous serions bien inspiré·e·s d’insister sur le fait – en tout cas pour les facultés concernées – que nous proposons aussi des cursus exclusivement germanophones pour qui le souhaite. Parce que ce Selbstverständnis de notre caractère bilingue n’est plus évident pour tout le monde en Suisse. Il n’est pas dit que ce soit notre argument de vente le plus fort désormais. Il peut même avoir un effet de repoussoir.

Y a-t-il donc un virage à opérer au niveau de la communication de l’Université en matière de bilinguisme?

Jacques Dubey: En ce qui concerne la Faculté de droit, je pense que notre communication à l’intention de la Suisse alémanique doit vraiment insister sur le côté facultatif, optionnel, du français. Faire passer le message que nous ne sommes pas une faculté romande. Nous sommes la plus suisse des facultés avec une possibilité de faire ses études exclusivement en allemand. J’utilise l’image du Coca Zéro: celles et ceux pour qui le français est le Hassfach ne vont pas être séduit·e·s par l’argument francophile de l’Université. Il faut leur offrir le contraire, la garantie d’études «zéro français». Pour ceux et celles-là, il faut vendre l’Unifr autrement que par son bilinguisme, mettre en avant ses autres attraits. Justement, il me semble qu’à partir des années 1990, notre alma mater s’est systématiquement positionnée comme une institution bilingue. Probablement était-ce juste à l’époque. Mais aujourd’hui je pense qu’un shift doit être opéré.

Katharina Fromm, cette politique de quasi systématique mise en avant du bilinguisme comme argument de vente de l’Unifr est-elle remise en question?

Katharina Fromm: Es ist, so glaube ich, in der DNA der Universität, dass man zweisprachig ist. Man lebt es ja auch im Alltag. Wir haben aber aufgrund der Tatsache, dass die deutschsprachigen Studierenden schwinden, eine Taskforce gegründet zur Frage, wie man am besten kommunizieren kann, dass es sehr viele Studiengänge gibt, die man nur auf Deutsch studieren kann. Wir hatten in unserer Frühlingskampagne Plakate in der Deutschschweiz, waren online und in den die sozialen Medien präsent. Aber es ist auf jeden Fall ein wichtiger Punkt, auch andere starke Merkmale der Universität hervorzuheben, wie zum Beispiel den extrem guten und persönlichen Kontakt zwischen Studierenden und Lehrenden. In der Phase nach Covid, in der sich die jungen Leute noch engeren Kontakt mit den Lehrpersonen wünschen, macht dies besonders Sinn.
Thierry Steiert: Wir von der Stadt sind auch besorgt, dass die Anzahl der deutschsprachigen Studierenden abgenommen hat und beteiligen uns mit unserem Kommunikationsdienst ebenfalls an dieser Kampagne. Es ist schliesslich im Interesse der Stadt mit ihren 40’000 Einwohnerinnen und Einwohnern und rund 11’000 Studierenden. Ich sage immer: «Wenn es der Uni gut geht, geht es der Stadt gut.» Was wir gerne hätten, ist, dass man vielleicht den Aspekt «Universitätsstadt par excellence» noch verstärkt. Und die Gymnasiast_innen, die kurz vor einem Entscheid stehen, fragt: «Willst du in einer Unistadt studieren, die dir ein einmaliges Studentenleben bietet?» Hier in Freiburg steht den Jugendlichen etwas zur Verfügung, das typisch deutsche Unistädte wie Tübingen, Göttingen oder Heidelberg anbieten: Eine super Universität und zusätzlich auch noch eine hervorragende Lebensqualität. Ein kulturelles Angebot, ein Sportangebot, alles in unmittelbarer Nähe. Und zudem sind die Lebenskosten in Freiburg im Vergleich zu anderen Unistädten niedrig.

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Jacques Dubey est doyen de la Faculté de droit et professeur de droit constitutionnel. 
jacques.dubey@unifr.ch

Was sind – neben den Aspekten wie der Lebensqualität in der Stadt – die Hauptverkaufsargumente der Unifr?

Katharina Fromm: Meiner Meinung nach ist die grosse Stärke der Universität die Pflege der persönlichen Kontakte, die wir vorher erwähnt haben. Die Möglichkeit, in kleinen Gruppen zu arbeiten und das sehr gute Verhältnis zwischen Studierenden und der Professorenschaft. Wir bieten natürlich auch ein grosses Angebot an verschiedenen Fächern an und werden es bald ausbauen mit einer sechsten Fakultät für Erziehungs- und Bildungswissenschaften. Dieses breite Angebot – sowie Spitzenforschung und Spezialisierungen wie etwa das Schweizerische Institut für Islam und Gesellschaft, das Institut für Föderalismus oder das neue Institut für Lebensmittelwissenschaften – machen die Universität wirklich attraktiv.

Si l’Unifr n’était pas bilingue, elle pourrait donc sans problème s’appuyer sur d’autres arguments pour attirer des étudiant·e·s?

Jacques Dubey: Absolument! Lors des deux derniers examens fédéraux de médecine, la Faculté des sciences et de médecine de l’Unifr s’est distinguée en obtenant les meilleurs résultats du pays. Cela, vous ne l’obtenez pas sans avoir une cohésion particulière entre les professeur·e·s qui ont conçu ce programme et ont mis au point une pédagogie particulière. C’est permis par la taille fribourgeoise, par l’esprit de Fribourg lié à cette taille.
Katharina Fromm: Pour compléter: récemment, l’Unifr a été classée troisième Université en Suisse à former les cadres. Le nombre de personnalités politiques qui sont passées par l’Unifr est d’ailleurs assez impressionnant.

Pour en revenir au bilinguisme: Thierry Steiert, vous avez indiqué que Fribourg est de plus en plus perçue comme pure romande en Suisse alémanique…

Thierry Steiert: Cette perception n’est pas en soi étonnante. La part des habitant·e·s germanophones de la ville a diminué, au point de devenir relativement faible. La langue de travail est essentiellement le français. Une personne vivant à Fribourg qui ne parle que l’allemand sera un peu perdue, ce qui n’est pas forcément le cas à Bienne, où la proportion de personnes parlant la langue minoritaire – en l’occurrence le français – est beaucoup plus élevée. Il faudrait d’ailleurs arrêter de comparer Bienne et Fribourg, qui ont des réalités complètement différentes. Or, malgré sa faible proportion de germanophones, Fribourg est située à la frontière des langues et a une identité – et une histoire – germanophone comme francophone. Il est donc important de mettre en valeur ce bilinguisme même si la seule langue officielle – au niveau juridique – est le français. L’administration fribourgeoise pratique ce qu’on appelle le «bilinguisme pragmatique»: tout est traduit et on répond aux questions des citoyen·ne·s germanophones dans leur langue.

Dans un contexte de globalisation, l’Unifr n’aurait-elle pas meilleur temps de dépasser la notion de bilinguisme et de se tourner vers l’anglais, notamment afin d’attirer davantage d’étudiant·e·s étrangers·ères?

Katharina Fromm: Dass man die Universität international positioniert ist natürlich wichtig, aber das tun wir eher über die Forschung. Indirekt wird dann auch über die Universität Freiburg, die Stadt und den Kanton geredet, was letztendlich ein Pluspunkt ist. Wir haben im Moment einen Anteil von 17 Prozent internationaler Studierender, viele aus Frankreich und Deutschland. Um den Anteil der Deutschsprachigen zu erhöhen, so könnte man argumentieren, sollten wir vielleicht mehr Werbung machen in Deutschland und Österreich. Ich glaube aber, dass es wichtig ist, weiterhin Studierende aus der Deutschschweiz anzuziehen. Also sollten wir wohl eher vor Ort, in den verschiedenen Kantonen, noch aktiver Werbung machen.
Thierry Steiert: Mir ist es ein Anliegen, dass die Nationalsprachen nicht nur gelebt werden, sondern dass man sie auch qualitativ gut pflegt. Das Fördern der englischen Sprache führt schon zu einer gewissen Gefährdung des guten Beherrschens der Muttersprache, nicht zuletzt der zweiten oder dritten Nationalsprache. Klar kann man heute Englisch nicht mehr umgehen, gerade im Bereich der Naturwissenschaften. Aber man sollte nicht vergessen, wie viele schöne Sprachen wir hier haben, die sogar europäische Kultursprachen sind.

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Thierry Steiert est syndic de la Ville de Fribourg. 
secretariat.syndic@ville-fr.ch

Verschiebung von der deutschen zur französischen Sprache

Die Universität Freiburg ist seit Anbeginn 1889 vielsprachig. Als einzige Universität auf «katholischem Boden» lockte sie viele Studierende aus dem Ausland, aber natürlich vor allem aus der deutschsprachig dominierten Schweiz an. Trotz zunehmender Entkonfessionalisierung wird noch Ende der 70er Jahre eine «Germanisierung» beklagt. Ab den 90er Jahren wird die Zweisprachigkeit systematisch zum neuen Identifikationsmerkmal und Mehrsprachigkeit als ökonomische Ressource verstanden. 2010 gaben erstmals mehr Studierende Französisch als Deutsch an bei der Frage nach der gewünschten Korrespondenzsprache. 2023 wollten 64,4 Prozent auf Französisch, 32,2 Prozent auf Deutsch und 3,4 Prozent am liebsten auf Englisch angeschrieben werden. Noch 2004 erreichte Deutsch einen Höhepunkt mit 5430 Studierenden. In nicht einmal 20 Jahren sind über 2000 Studierende weggefallen (2023: 3277). Bei der französischen (Korrespondenz-) Sprache geschieht derweil genau das Gegenteil. Mit 6549 Studierenden verzeichneten sie letztes Jahr rekord­hohe Immatrikulationszahlen.