Depuis 18 ans, Joël Gapany œuvre au sein du Décanat de la Faculté des lettres. La mise en place de la réforme de Bologne a occupé une place importante dans son travail. Son départ approche puisqu’il reprendra en mai la tête de la Haute école de travail social de Fribourg. Il revient sur ses années à l’Université et partage sa vision du futur du paysage des hautes écoles en Suisse.
Joël Gapany, expliquez-nous votre rôle au sein de l’Université.
Je suis adjoint au doyen de la Faculté de lettres. Mon travail se définit en trois axes. Je dirige l’administration centrale de la Faculté, j’assure la coordination entre ses différentes instances et je conseille le doyen ou la doyenne dans les affaires de politique universitaire, tant aux plans international que suisse et local. Il s’agit donc d’une responsabilité dans la conduite opérationnelle. Le nom de la fonction a récemment changé, je suis désormais «administrateur de Faculté». Ce changement n’est pas si anodin. Il y a quelques années, l’adjoint était plutôt perçu comme un académique engagé dans l’administration. Aujourd’hui, la fonction a une dimension plus opérationnelle.
Quel a été votre principal défi durant ces 18 années?
La mise en place de la réforme de Bologne a occupé une large partie de mon engagement. On le disait à l’époque – et je crois que cela se confirme aujourd’hui –, la réforme de Bologne a constitué l’un des plus grands bouleversements du paysage des hautes écoles de ces 150 dernières années. La transition a été un processus global qui a, à la fois, permis une restructuration de l’Université et du paysage de l’enseignement supérieur et ouvert de nouvelles opportunités.
Quels sont donc les effets de la réforme de Bologne, outre l’introduction du système de bachelors et masters?
D’un point de vue général, les différents types de hautes écoles ont repensé leur intégration mutuelle. Nous avons besoin de davantage de collaborations, des collaborations appelées à se renforcer dans les années à venir. Nous avions aussi besoin d’une réflexion globale sur les cursus et les plans d’études. Celle-ci a, de mon point de vue, eu des effets positifs. La réforme nous a aussi permis de repenser notre lien à la cité; une réflexion qui a généré des projets intéressants, par exemple l’organisation d’un cours-pilote visant à mettre en contact les étudiants de la Faculté des lettres et les entreprises.
L’Université s’était-elle déconnectée des besoins de la société?
Je ne dirais pas que l’Université était déconnectée, mais ce lien avec la cité n’était pas son souci primordial. En exagérant le trait, on pourrait utiliser la métaphore de la tour d’ivoire. Aujourd’hui, on est plus attentif à cette question et je pense que c’est une bonne chose. La société s’est largement transformée durant ces dernières années et nous devons en tenir compte. Pour prendre un exemple, l’accès aux études s’est fortement démocratisé et cela modifie, bien sûr, le rayonnement de l’institution.
L’Université doit-elle offrir des études utiles et adaptées au monde du travail?
Je ne pense pas qu’on doive vouloir à tout prix offrir des études utiles. La préoccupation première d’une faculté des lettres n’est pas de former des gens à un type particulier d’activité, sauf, peut-être, en ce qui concerne la carrière académique et certains domaines spécifiques, comme l’enseignement ou la pédagogie spécialisée. Nous devons cependant nous soucier de donner à nos étudiants les compétences qui vont leur permettre de valoriser leurs études dans la société actuelle. C’est une responsabilité importante.
Vous vous tournez maintenant vers le monde des hautes écoles spécialisées. Qu’est-ce qui motive ce virage?
A l’avenir, les grands défis vont sans doute concerner les hautes écoles spécialisées. Elles auront un rôle important à jouer dans le développement du paysage des hautes écoles. Dans l’élan de Bologne, celles-ci ont créé une conférence commune avec l’organe swissuniversities. C’est un signe fort. On se dirige vers une distribution en termes de pôles de compétences. Prenons un exemple concret: on a dit durant des années que les universités s’occupaient de recherche fondamentale, alors que les hautes écoles spécialisées étaient davantage concernées par la recherche appliquée. La recherche fondamentale peut cependant avoir des retombées très pratiques et, à l’inverse, la recherche appliquée peut déboucher sur des résultats inspirants pour la recherche fondamentale. Nous devons donc repenser notre rapport au savoir, à la recherche et à la formation. C’est un défi passionnant dans un monde en évolution et je me réjouis d’apporter ma contribution à ce processus.
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