On peut très bien concilier médecine et poésie. Loin de s’exclure, ces deux arts se nourrissent l’un de l’autre. Julie Delaloye, Yves Namur et Emmanuel Venet pratiquent ces deux arts et ne s’en portent que mieux… Ils se sont réunis à l’Unifr, le 30 mars dernier, dans le cadre d’un colloque international intitulé «La figure du poète-médecin XXe-XXIe siècles».
Captation de la table ronde.
«Troubadour», «ménestrel», voici les synonymes mentionnés par Le Larousse sous le terme de «poète». Des mots à connotation allègre, divertissante, voire farfelue, qui n’évoquent pas forcément la rigueur, surtout quand on les appose à la profession de médecin: médecin-poète, chirurgien-ménestrel, psychiatre-troubadour! «Il se peut qu’un patient craigne de se faire opérer par un chirurgien-poète, de peur que celui-ci ne s’extasie devant ses intestins. Le poète passe pour quelqu’un de pas très sérieux», reconnaît Yves Namur, médecin et écrivain belge.
Une appréhension partagée par son confrère Emmanuel Venet . Au moment de publier son premier livre, ce psychiatre lyonnais qui donne également des cours à l’Université de Fribourg dans le cadre du cursus Médecine et société, a songé à le faire sous pseudonyme: «La question s’est posée fortement car j’exposais mon intimité dans cet ouvrage. Gallimard m’a toutefois convaincu de renoncer à cette idée afin que je puisse revendiquer mon œuvre.»
Même si les médecins taisent le plus souvent cette double identité de médecin et de poète, il arrive que leurs patients l’apprennent incidemment. Et à mille lieues des craintes évoquées, certains en conçoivent même une certaine curiosité: «Il y a de nombreux malades qui m’ont amené un de mes livres pour le dédicacer, raconte Emmanuel Venet, ils sont d’une indulgence infinie!»
Soigner par le verbe
La poésie ne peut évidemment pas guérir un patient d’un cancer. En revanche, de maîtriser ses ressorts peut, selon Yves Namur, faciliter la communication entre le praticien et son malade: «Si tous les étudiants en médecine étaient confrontés, non seulement à la poésie, mais aussi à la musique et à la peinture, ils porteraient un regard différent sur la réalité.»
De son côté, Emmanuel Venet ne s’interdit pas de prescrire certains ouvrages à ses patients. «Cela peut leur donner un regard plus affuté sur leur situation», estime-t-il.
La poésie permet également, selon ces médecins-poètes, d’admettre et d’accepter le doute, dans une discipline qui cherche à tout prix à le bannir.
Et Julie Delaloye, médecin, chercheuse et poète à Lausanne, de conclure: « Quand nous restons sans réponse face à la maladie et la souffrance, il reste toujours un poème.»
Vers le site Médecine et société: http://www.unifr.ch/mh/fr
Vers le programme du colloque: goo.gl/qqYMsY
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