Des laboratoires, sous forme de valises, qui se déplacent dans les écoles pour transmettre la biologie aux élèves du secondaire I et II: c’est la démarche originale, née d’une collaboration entre les Facultés des sciences et des lettres de l’Université de Fribourg.
«Mais c’est dégueulasse!» Le garçon sursaute et lève son nez du microscope. Sous sa lentille gigote une artémie, un micro-crustacé, minuscule en fait, mais qui ressemble à une créature sortie tout droit d’un roman de Lovecraft, par l’effet d’un verre grossissant. Aux côtés de l’enfant, une petite vingtaine d’écoliers de 10 à 11 ans participaient à cet atelier organisé récemment à l’Université de Fribourg, par le Département de biologie, dans le cadre de la journée Futur en tous genres.
Au programme, une plongée dans l’univers microscopique pour découvrir une faune improbable: vers de terre, cloportes, collemboles, ou encore nématodes, ces petits vers que l’on élève en laboratoire. Les tardigrades, surnommés les oursons d’eau en référence à leur allure pataude, sont quant à eux des micro-organismes capables de survivre à des températures extrêmes, voire dans l’espace, grâce à une technique qui intéresse la recherche. Pouvant se vider complètement de leur eau, ils se lyophilisent temporairement.
Des valises «clés en main»
Loin de se résumer à cette seule matinée, de tels efforts nécessaires de transmission du savoir occupent les Départements de biologie et des sciences de l’éducation depuis plusieurs années. Ceux-ci ont uni leurs connaissances au sein d’une démarche originale, qui propose des laboratoires itinérants pour offrir des outils pédagogiques aux classes du secondaire I et II. Le matériel se présente sous la forme de valises «clés en main» que les enseignants peuvent se procurer auprès du Musée d’histoire naturelle de Fribourg.
Baptisé Lab2Rue, «ce projet est né de l’idée que, pour rendre les sciences attractives et attirer l’attention sur l’importance de la biologie, il est important de renouveler et d’actualiser le matériel dans les écoles», explique son initiatrice, la Docteure Marie-Pierre Chevron. Maître d’enseignement et de recherche en sciences de l’éducation et spécialiste de la didactique de la biologie, elle enseigne également la biologie aux élèves du Gymnase intercantonal de la Broye (GYB). L’autre intérêt de Lab2Rue, selon la Docteure en biologie Chantal Wicky, qui a rejoint le projet en 2014, c’est qu’il permet de sensibiliser certains élèves à la recherche dans ce domaine où la relève tendrait à s’amenuiser.
Les ateliers scientifiques que propose ce laboratoire interfacultaire s’intègrent dans le plan d’études romand et le plan d’études cadre des écoles de maturité. «Nous faisons partie d’un réseau suisse de laboratoires publics comprenant des structures comme l’Eprouvette à Lausanne, le Technorama à Winterthour ou le Bioscope à Genève, avec lesquelles nous collaborons. A l’échelle européenne, nous travaillons aussi avec d’autres structures, comme l’Ecole de l’ADN en France», explique la professeure.
Un ver au corps transparent
Concrètement, chaque valise de Lab2Rue, contient tout un matériel didactique ainsi que des protocoles mis au point par les étudiants et doctorants des deux départements. A partir des mêmes outils de base, les scénarios proposés permettent d’aborder différentes thématiques. Deux types de valises existent aujourd’hui. La valise «ADN» propose de mieux connaître la génétique à l’aide de pipettes, d’une micro-centrifugeuse, de ciseaux moléculaires et d’échantillons d’ADN.
Quant à la valise «Apprendre avec elegans», elle offre la possibilité de découvrir un nématode bien connu des chercheurs, car facilement observable et manipulable. Il s’agit de C. elegans (Caenorhabditis elegans), un ver dont le corps transparent permet entre autres de comprendre le fonctionnement des organes reproducteurs. Vivants, les vers ne se trouvent pas directement dans la valise, mais sont mis à disposition sur demande par le Département de biologie.
En plus de ces ateliers itinérants, les initiateurs proposent des cours de formation continue aux enseignants qui le désirent. «Au printemps de cette année, deux formations ont réuni vingt-quatre enseignants et, dans la foulée, dix-huit classes ont pu profiter de nos valises», se réjouit Chantal Wicky, qui précise que tout reste ouvert quant à d’éventuels développements futurs. Financièrement, Lab2Rue est soutenu par le fonds de recherche de l’Université de Fribourg. Il a également reçu une aide de l’Académie des sciences, via le programme de promotion MINT Suisse.
__________- Page de présentation de Lab2Rue
- Page de Marie-Pierre Chevron
- Page de Chantal Wicky
- Photos prises durant la Journée futur en tous genres 2017, par Farida Khali − Unicom
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