Aujourd’hui tout le monde joue… Ou presque. Mais les activités ludiques ont-elles toujours eu bonne presse? A l’Unifr, un nouveau groupe de recherche se penche sur la question. A quelques jours du Café scientifique consacré à ce thème, Véronique Dasen, professeure en sciences de l’Antiquité, nous parle du jeu et de ses enjeux.
Véronique Dasen, le jeu est-il mort ou vive le jeu?
Aujourd’hui, la culture ludique connaît deux tournants importants. D’une part, le jeu occupe à nouveau une place centrale dans la vie sociale. Comme dans l’Antiquité, on joue partout, sans se cacher, chez soi ou dans l’espace public; pas simplement pour se détendre ou se distraire, mais aussi pour communiquer, créer et se relier à des communautés, virtuelles ou présentielles.
D’autre part, les formes de la culture ludique semblent se transformer d’une manière radicale et globalisée avec les outils numériques en soulevant de nombreuses questions. Les jeux virtuels vont-ils faire disparaître les jeux traditionnels d’autrefois? S’agit-il d’un patrimoine en péril? Qui se souvient encore des règles des jeux d’osselets, de billes ou de pair/impair? Comment ces savoirs non écrits se sont-ils transmis et se transmettent-ils encore?
Aujourd’hui on pare le jeu de toutes les vertus, psychologiques, sociales, pédagogiques; mais est-ce que cela a toujours été le cas?
La valeur éducative du jeu est reconnue dans notre société occidentale, dès la Grèce ancienne. Platon et Aristote formulent de manière précise l’apport du jeu dans la construction de l’identité et des compétences de l’enfant. Le jeu constitue aussi un moyen précieux, encore insuffisamment exploité, de faire se rencontrer des communautés de culture différente.
Vous avez reçu une bourse prestigieuse pour remonter aux origines antiques du jeu et vous avez rassemblés un très large panel d’experts autour de cette recherche. Qu’espérez-vous réaliser?
L’objectif est d’entreprendre une étude d’ensemble sur le jeu en tant que phénomène culturel à part entière, susceptible d’apporter un nouvel éclairage sur les modes de fonctionnement des sociétés passées, comme l’agentivité (terme dérivé de l’anglais signifiant la capacité à agir sur le monde, les choses, les êtres, à les transformer ou les influencer, ndlr) des enfants, la dynamique des rapports entre hommes et femmes, entre enfants et adultes… Il s’agit aussi de réfléchir de manière comparative et pluridisciplinaire − en s’interrogeant sur les ruptures et les continuités − pour saisir, entre autres, les transformations de la sociabilité que peuvent révéler les types de compétences que les jeux entendent développer, hier et aujourd’hui. Le jeu permet aussi d’accéder à la manière d’appréhender le destin et plus largement le rapport au divin.
- Le Café scientifique «Le jeu est mort, vive le jeu!» aura lieu le mercredi 13 décembre 2017, au Nouveau Monde à 18h00.
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