Du 1er au 24 décembre un membre de la communauté universitaire vous offre ses mots, un texte, un conte, un poème, une pensée qui l’a touché, ému, fait rire ou réfléchir. Ouvrez la porte, aujourd’hui c’est Serge Keller qui frappe.
Un sacré bon Noël!
Un de mes auteurs favoris a écrit: «Nos esprits façonnent des histoires, et les histoires façonnent nos esprits.» Non, je ne vous dévoilerai pas son nom, je vous laisse le deviner! Mais tout comme lui, je pense que Linné a commis une erreur, lorsqu’il a nommé notre espèce Homo sapiens, «l’homme qui sait». Mis à part l’arrogance de cette dénomination, en réalité nous sommes bien plus Pan narrans, le chimpanzé qui raconte. Les histoires sont quelque-chose de puissant. Nos propres cultures s’appuient sur les histoires, elles existent grâce à elles.
N’étant pas croyant, Noël n’a pas de signification religieuse particulière pour moi. Pourtant, la fête fait partie de ma culture. Je la célèbre à ma manière, c’est un moment important dans l’année. Peut-être de manière un peu plus païenne ou primitive, je la considère comme une célébration du solstice d’hiver: on se réjouit du retour des jours.
Mais alors, quelle est l’histoire représentant Noël pour moi? Eh bien, c’est celle du Père Noël, tout simplement. Oui, je la porte toujours en moi depuis mon enfance, l’histoire de ce vieil homme barbu aux origines se perdant dans les ténèbres du temps. Et qui ne fut pas toujours bienveillant, d’ailleurs…
Plusieurs histoires du Père Noël m’ont profondément marqué, la plupart dans mon enfance bien sûr. Beaucoup d’entre elles étaient richement illustrées: de «Babar et le Père Noël» aux «Lettres du Père Noël» de J.R.R. Tolkien, en passant par «La légende du Père Noël» de L. Frank Baum… Sans parler, bien entendu, des histoires que mes propres parents me racontaient!
Mais s’il y a une image qui pour moi représente le Père Noël, c’est celle du merveilleux livre «Sacré Père Noël», illustré par Raymond Briggs. Ma fenêtre de l’Avent est entièrement inspirée de son ouvrage: je me suis limité à l’adapter au format oral. Je vous invite vivement à découvrir ce petit bijou, si vous ne le connaissez pas encore, ou à le faire découvrir à vos enfants.
Chaque année, Noël approchant, je me fais plaisir en ressortant de ma bibliothèque ma vieille copie aux pages jaunissantes de «Babbo Natale». Enfant, c’est en effet dans sa traduction italienne que j’ai découvert l’histoire de ce vieux monsieur bougon, qui déteste le froid et la neige et rêve de vacances ensoleillées sur des plages bien chaudes. Il grommelle, il râle, il aime bien manger et boire un bon cognac. Pour lui, Noël c’est en somme la plus longue nuit de travail de l’année. Il doit bien sortir pour accomplir son devoir, mais il préférerait tellement passer un bon petit moment tranquille chez lui…
Et vous savez quoi? Ce simple petit retournement de point de vue me rend le personnage, tel qu’imaginé par Briggs, éminemment sympathique. Il est, certes, grognon, mais derrière tous ses marmonnements on devine qu’il a un très bon cœur. Si seulement son travail ne le faisait pas sortir de nuit, en plein cœur de l’hiver! Nous reconnaissons tous le stéréotype de ce vieil homme ronchonneur, qui se plaint de tout mais qui, en définitive, aime ce qu’il fait. Peut-être même en connaissez-vous personnellement un?
En nous montrant ce côté humain du Père Noël, Briggs parvient non seulement à décrire son quotidien de manière fascinante pour les enfants, mais le rend également attachant et inoubliable pour les adultes. Et ça, c’est le signe d’une sacrée bonne histoire!
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