Dans le cadre d’un colloque intitulé «Figures de la faiblesse», Léonora Miano participera à une discussion publique, mardi 21 juin à 17h15 à Miséricorde. L’auteure nous propose de changer de regard sur la question.
Léonora Miano, vous serez présente, ce mardi 21 mai, à l’Université de Fribourg dans le cadre d’un colloque consacré à la faiblesse. Qu’est-ce qui vous a intéressée dans cette thématique?
Je m’intéresse à un possible retournement de l’idée de faiblesse. Il me semble qu’elle se fonde en général sur une idée assez partagée de la puissance comme capacité de dominer, de nuire, voire de détruire. C’est pour cette raison que sont considérés comme puissants les détenteurs des armes les plus meurtrières, ou ceux qui seraient en mesure d’imposer aux autres des échanges inéquitables. Or, ceux qui doivent user de violence pour s’imposer sont peut-être les plus faibles, leur vision du monde étant guidée par la peur de manquer, la peur de l’autre, la peur de la dissolution identitaire, etc. C’est à cela que j’aimerais proposer à tous de réfléchir, afin de voir comment une compréhension moins verticale de la puissance pourrait permettre d’aboutir à une lecture plus complexe de la faiblesse.
Votre conférence s’intitule «Habiter sa faiblesse». Pensez-vous que nous devons volontairement nous réapproprier notre faiblesse pour mieux nous construire sur celle-ci?
A mon avis, et étant donné mon propos précédent, «Habiter sa faiblesse» revient d’abord à la comprendre comme l’inverse de ce qui est habituellement énoncé. Il ne s’agit pas de récuser l’idée de vulnérabilité, qui est au cœur de l’expérience humaine, mais de la considérer comme porteuse d’enseignements et de nouvelles modalités de la relation.
Qui sont, selon vous, les personnes touchées par la faiblesse? Comment pensez-vous qu’elles peuvent s’en relever, en faire un atout?
Quelle que soit la définition que l’on donne à ce terme – celle plus commune ou celle que j’envisage – je ne vois pas d’exception… Si les Français étaient par nature ou pour tout autre raison plus puissants que les Togolais, par exemple, ils ne seraient probablement pas les premiers consommateurs d’antidépresseurs au monde. La même fragilité s’exprime de manière différente selon l’environnement. Toutes les formes de faiblesse ne sont pas des atouts au moment de leur expression. Il peut arriver qu’elles ne le deviennent qu’a posteriori, lorsque l’on a compris sa propre histoire et décidé de ne pas la reconduire.
Le notions de puissance et de faiblesse jouent-elles un rôle dans votre travail d’écriture?
En tant que telles, non. Je raconte des histoires, avant tout. Certains sujets viennent s’y glisser en fonction de ce que vivent les personnages.
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