Sommes-nous vraiment maîtres de nos décisions?

Sommes-nous vraiment maîtres de nos décisions?

Fake news, manipulations, croyances infondées… Nos biais cognitifs influencent nos choix bien plus qu’on ne le pense. Dans le cadre de la semaine du cerveau, Sandra Chatelain et Vincent Verdon, deux neuropsychologues, vous donneront des stratégies pour les identifier et les éviter.

Pouvez-vous nous donner un exemple concret où un biais cognitif vous a mené à prendre une mauvaise décision?
Tout le monde peut trouver ses propres exemples, que ce soit dans sa vie personnelle ou en général. Qui n’a jamais cédé et finalement acheté un produit face à un vendeur aux arguments apparemment convaincants? Qui n’a jamais partagé une information sensationnelle sans vérifier au préalable si elle était vraie? Un très bon exemple est celui du biais de confirmation en politique: chaque personne tend à privilégier les idées de son parti, quitte à critiquer systématiquement celles des autres, dans le but de renforcer ses propres croyances et convictions.

De manière générale, quels sont les biais cognitifs les plus répandus?
Le biais de confirmation est très répandu, notamment dans les médias et particulièrement sur les réseaux sociaux. Il pousse à privilégier les informations qui confirment notre manière de penser, tout en minimisant ou en ignorant celles qui vont dans le sens contraire. De même, le cherry picking (cueillette des cerises) consiste à ne garder que les arguments qui nous arrangent. Un autre biais très répandu est l’effet Barnum, qui nous pousse à accepter une description vague comme s’appliquant forcément à nous. L’astrologie repose sur ce biais en proposant des descriptions apparemment spécifiques, mais en réalité valables pour tout le monde (par exemple: «Cette semaine, les Scorpions vont vivre un événement inattendu qui pourrait les surprendre.»)

Pourquoi ces biais sont-ils problématiques dans la vie de tous les jours?
Tous les biais ne sont pas forcément problématiques au quotidien. C’est surtout lorsqu’ils nous mènent à prendre une mauvaise décision qui nous impacte de manière négative qu’ils deviennent un problème. À l’ère des réseaux sociaux, ces biais permettent de manipuler facilement aussi bien les jeunes que les adultes, les incitant à prendre certaines décisions (en matière de consommation ou de croyances sur des faits d’actualité) qui peuvent s’avérer problématiques à long terme. S’il n’existe pas de méthode miracle pour éviter tous les biais dans la vie quotidienne, certaines astuces permettent de relativiser une décision prise trop rapidement, au profit d’une réflexion certes plus longue, mais finalement plus pertinente.

J’ai l’impression qu’on nous sert ce concept à toutes les sauces depuis quelques années. Y a-t-il un buzz autour des biais cognitifs?
C’est surtout leur identification dans certains stratagèmes d’arnaques et leur mise en avant dans les médias (notamment sur les réseaux sociaux) qui donnent cette impression. Les biais cognitifs se situent à mi-chemin entre les neurosciences et la psychologie sociale, deux domaines des sciences humaines qui suscitent un intérêt croissant. Mieux connaître ces biais et les moyens d’y remédier permet aussi de limiter autant que possible les erreurs de jugement lors de futures prises de décisions.

Comment peut-on éviter que nos biais nous induisent en erreur?
C’est justement le sujet de la conférence du 13 mars. Mais pour les plus impatient·e·s ou celles et ceux qui connaissent déjà le domaine, le premier conseil consiste à prendre le temps nécessaire pour soigneusement vérifier les informations qui nous parviennent avant de prendre une décision. Si cela s’avère difficile en pratique, le principe du rasoir d’Ockham constitue une stratégie très efficace. Autrement dit, inutile de chercher des causes complexes si une explication plus évidente suffit. Et si cela n’est pas encore très clair, tout sera expliqué et illustré lors de cette intervention sur les biais cognitifs, organisée à l’occasion de la Semaine du cerveau.

_______

 

Author

The long and winding road! Après un détour par l'archéologie, l'alpage, l'enseignement du français et le journalisme, Christian travaille depuis l'été 2015 dans notre belle Université. Son plaisir de rédacteur en ligne? Rencontrer, discuter, comprendre, vulgariser et par-ta-ger!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *