Wonderberg 4000 pourrait bien faire de l’ombre aux destinations les plus huppées des Alpes… Du moins, si elle existait. Cette station de ski est née de l’imagination de Benoît Dietrich et Stefano Christen. Les deux cinéastes fribourgeois, soutenus par un programme de Résidences d’artistes de recherche et développement de la Ville de Fribourg en partenariat avec l’Université de Fribourg, souhaitent en faire un court-métrage afin d’interroger notre rapport à la montagne et à la vérité.
Pourquoi avoir choisi de réaliser un film sur une station de ski?
Benoît Dietrich: Il y a en Suisse un vrai besoin de repenser notre relation à la montagne. Comment la percevait-on il y a 200 ans? Comment ces hameaux, autrefois modestes et soumis à des conditions climatiques difficiles, sont-ils devenus des villes sur la neige, dépendant exclusivement d’une activité économique?
Stefano Christen: Il y a deux siècles, la montagne inspirait la crainte. Aujourd’hui, nous n’en tirons que des bénéfices. Dans le contexte du réchauffement climatique, il est essentiel de se poser cette question: quelle place voulons-nous donner à la montagne dans nos vies, notamment d’un point de vue culturel?
Mais pourquoi avoir opté pour le docu-fiction?
Benoît Dietrich: A l’ère des fake news, il devient très difficile de distinguer le vrai du faux. On se questionne rarement sur l’origine des images que l’on regarde. Qui me parle? Pourquoi me suggère-t-on de visionner ce film? Quelles idées véhicule-t-il? Qu’est-ce qui est réel, qu’est-ce qui ne l’est pas? Avec notre collectif, nous trouvons intéressant de jouer avec cette frontière entre réalité et fiction.
Stefano Christen: Se poser ce genre de questions est essentiel, pas seulement pour notre film, mais de manière générale. C’est un aspect qui nous tient particulièrement à cœur.
Vous êtes les lauréats d’une bourse de soutien financier de la Ville de Fribourg et vous êtes en résidence à l’Université de Fribourg. Qu’est-ce que cela vous apporte?
Benoît Dietrich: Dans les milieux artistiques, les phases de recherche sont rarement financées. C’est donc une opportunité incroyable. Nous avons la possibilité de prendre du temps pour développer notre projet en profondeur, ce qui le rendra beaucoup plus solide par la suite.
Et concrètement, comment cela se traduit-il?
Benoît Dietrich: Nous réalisons des essais avec des acteurs et actrices, nous testons le montage pour voir ce que nous pouvons créer de nouveau. Notre objectif est de capter l’attention du public, pour qu’il s’interroge en permanence sur ce qui est vrai ou non, sur ce qui existe ou n’existe pas.
Pour approfondir votre thématique, vous avez rencontré des glaciologues de l’Université de Fribourg. Quelle a été leur réaction?
Stefano Christen: Les scientifiques ont été très intéressés par notre démarche, car elle leur offrait un regard extérieur et différent sur leur travail, qui est souvent très rigoureux et méthodique. Nous, en tant qu’artistes, apportons une approche plus sensible, qui parlera autrement au public.
Vous souhaitez réaliser un court-métrage d’une dizaine de minutes. Quand pourra-t-on le voir?
Benoît Dietrich: Si tout se passe bien, dans un peu plus d’un an. Mais avant cela, nous devons obtenir un financement, ce qui est loin d’être simple. Nous devons rédiger un dossier d’environ 70 pages, incluant le scénario, des notes d’intention, de production, ainsi qu’un budget détaillé. Tout cela prend du temps, et il est difficile à trouver, car nous devons accepter d’autres projets alimentaires qui viennent interférer avec cette étape cruciale.
Stefano Christen: Les glaciologues avec qui nous travaillons connaissent la même réalité : parfois, ils cherchent sans succès. Cette résidence nous permet donc de dépasser nos limitations habituelles. C’est une formidable opportunité pour repousser les frontières de notre créativité !
_________- Benoît Dietrich
- Stefano Christen
- Résidences artistiques de la ville de Fribourg